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"Nouveau" Régime du Droit d'auteur

Dernière mise à jour : 6 déc. 2023

Décision anticipée n°2 sur le "nouveau" régime des droits d'auteur : exclusion des logiciels

L’arrêt dont il est question ici porte sur l’ancien régime de faveur des droits d’auteur, c’est-à-dire le régime tel qu’il était applicable avant sa modification par la loi-programme du 26 décembre 2022. Pour la description fiscale des droits d’auteur visés, le régime se référait aux droits d’auteur, droits voisins ou licences visés au « Livre XI CDE » (à savoir le livre qui traite de « la propriété intellectuelle et des secrets d’affaires »). Ce livre traite dans son « Titre 5 » du « droit d’auteur et [des] droits voisins » et dans son « Titre 6 » des « programmes d’ordinateur ». Ce dernier titre prévoit explicitement que « les programmes d’ordinateur, en ce compris le matériel de conception préparatoire, sont protégés par le droit d’auteur et assimilés aux œuvres littéraires au sens de la Convention de Berne » (art. XI. 294, CDE ; voyez également ci-dessus).


Il n’y avait donc aucune doute que « l’ancien » régime fiscal du droit d’auteur était notamment applicable aux programmes d’ordinateur. Le ministre des Finances et le SDA l’avaient d’ailleurs clairement confirmé à l’époque (voyez, par exemple, Fisco. 2019, n°1380, p.7). Un autre enjeu, comme le montre l’arrêt ici commenté, était de savoir si le contribuable était bien l’auteur des programmes d’ordinateur pour lesquels sa société déclarait lui octroyer une rémunération au titre du droit d’auteur.


Dans le nouveau régime fiscal sur les droits d’auteur (le régime tel que modifié par la loi-programme ci-dessus), la définition des droits d’auteur visés est formulée différemment : il n’est plus fait référence au titre 6 et à l’article XI.294 du CDE (concernant l’assimilation des programmes d’ordinateur à des œuvres littéraires). Cela signifie-t-il que les logiciels ne peuvent plus bénéficier du nouveau régime fiscalement favorisé ? Lors des débats sur le projet de loi-programme au sein de la Commission de la Chambre, le ministre des Finances a laissé peu de doutes sur le fait que tel était bien le cas (Fisco. 2022, n°1772, p.1) ; et ce point de vue, a ajouté le ministre, est celui de son Administration et du SDA (Fisco. 2023, n°1776, p.14 ; pour un point de vue différent, voyez Fisco. 2022, n°1770, p.1).


Il ressort que la réponse du ministre des Finances à une récente question parlementaire que le SDA est toujours de cet avis : selon le ministre, « au sein des contours des nouvelles règles légales », le SDA est d’avis qu’il ne voit plus aucune possibilité d’émettre des décisions en matière de droits d’auteur sur les logiciels (Fisco. 2023, n°1807, p.14).


Application en l'espèce

La Cour prend en compte une multitude d’éléments et de circonstances concrets pour affirmer que le contribuable n’est pas l’auteur des programmes d’ordinateur, des lettres types, des conseils types et des modèles. Il n’y a pas lieu d’entrer ici dans les détails, cette appréciation étant largement influencée par les faits propres au dossier. Un résumé qui en retrace les grandes lignes est amplement suffisant.


S’appuyant sur les éléments précédents par l’Administration, la Cour constate que la convention de concession entre le contribuable et sa société a été conclue dans des circonstances suspectes. La mandataire ad hoc qui a signé la convention pour la société était l’épouse du contribuable.


Une note d’un ancien co-associé dans le procès-verbal de l’assemblée générale conteste expressément la qualité d’auteur du contribuable : la note mentionne que le contribuable ne connaissait aucun langage de programmation et que les programmes avaient été acheté auprès de fournisseurs extérieurs. Les documents présentés par le contribuable (codes sources de logiciels) n’indiquaient pas qui était l’auteur. Lors d’un contrôle fiscal et sur demande de l’Administration, le contribuable s’est avéré incapable de modifier quoi que ce soit aux programmes. Par ailleurs, il avait fait des déclarations divergentes. Des demandes de renseignements adressées aux anciens co-associés et d’anciens employés ont uniquement révélé que ces derniers ne connaissaient pas l’auteur des programmes.


Selon la Cour, l’ensemble de ces circonstances a permis à l’Administration de considérer avec un degré de vraisemblance suffisant que le contribuable ne semblait pas être l’auteur des programmes d’ordinateur.


La Cour estime que la même observation s’impose en ce qui concerne les lettres types, les conseils types et les modèles. En tout état de cause, la convention de concession n’en fournit pas une liste détaillée. Au cours du contrôle fiscal, il est apparu, au moyen de la fonction « Propriétés », que les documents en question avaient été établis par diverses personnes. L’Administration montra que ce type de documents peut facilement être trouvé sur Internet. Par ailleurs, la suite bureaucratique fournie par un fournisseur extérieur contenait également des documents et conseils types.


En aucun cas, il n’apparait que le contribuable a réalisé une création intellectuelle quelconque en ce qui concerne les lettres types, les conseils types et les modèles présentés. Le fait de stocker systématiquement de tels documents sur un système informatique centralisé ne leur confère pas la protection du droit d’auteur.


D’ailleurs, la semaine dernière, le SDA a renchéri en publiant une décision anticipée « négative », ce qui est plutôt exceptionnel, dans laquelle il affirme clairement et sans équivoque, en se référant largement aux propos tenus par le ministre en Commission parlementaire, que « les programmes d’ordinateur (en ce compris le matériel de conception préparatoire) qui, en vertu de l’art. XI.294, CDE [précité], sont assimilés aux œuvres littéraires au sens de la Convention de Berne et sont protégés par le droit d’auteur, n’entrent pas dans le champ d’application du nouveau régime » fiscal des droits d’auteur (décision anticipée n°2023.0659 du 3 octobre 2023 ; concernant la première décision anticipée relative au nouveau régime, voyez Fisco. 2023, n°1806, p.1).


Celui qui souhaite encore appliquer le nouveau régime des droits d’auteur aux droits d’auteur se rapportant aux logiciels sait donc à quoi s’en tenir : il ne pourra compter sur aucun accord de l’Administration ou du SDA.


Le nouveau régime est entré en vigueur le 1er janvier 2023 et s’applique aux revenus payés ou attribués à partir du 1er janvier 2023. Mais le législateur a prévu un régime transitoire pour quiconque perçoit des rémunérations qui étaient éligibles à l’ancien régime fiscal des droits d’auteur, mais qui (à partir du 1er janvier 2023) ne le sont plus au nouveau régime (ce qui est donc le cas pour les droits d’auteur sur les logiciel, selon l’Administration et le SDA). Ce régime transitoire permet le maintien du régime des droits d’auteur (mais il s’agit bien du nouveau régime) pendant un an (soit pour les revenus de 2023, exercice d’imposition 2024),


Moyennant une réduction de moitié de la limite de 37.500 € (avant indexation) ainsi qu’une réduction de moitié des plafonds servant de base à l’application du forfait pour charges (Fisco. 2022, n°1772, p.1).


Rappelons que le présent bulletin d’information a proposé une « solution médiane » qui met l’accent sur une autre condition posée par le législateur dans le nouveau régime, à savoir que les œuvres, du moins selon le ministre des Finances, doivent être destinées au « grand public « (Fisco. 2022, n°1772, p.3). Par application de cette nouvelle condition, le nouveau régime fiscal devient automatiquement beaucoup plus limité et exclut d’office certains programmes informatiques (sans qu’il soit nécessaire de les exclure par principe dès le départ) ;(voyez Fisco. 2022, n°1776, p.6).


Source : Le Fiscologue n°1808 (20/10/2023)

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